INTERVIEW DJADO MADO, LA SINGULARITÉ AU SENS PROPRE

INTERVIEW DJADO MADO, LA SINGULARITÉ AU SENS PROPRE

Le vendredi 3 décembre 2021 est sorti l’EP « NOOR 2 », troisième projet du rappeur Djado Mado. Jeune pépite issue de la ZUP de Valence, nous avons eu la chance de nous entretenir avec lui afin de revenir sur ce superbe projet qu’il vient de nous délivrer.

Qui est Djado Mado ? Qu’est-ce que ça signifie ?

Djado c’est par rapport à Djadid qui est mon prénom et Mado comme je l’explique dans le titre Faire crier la guitare, je le dois à un mec qui s’appelle Stucky. J’étais assez turbulent à l’époque et donc ça vient du mot mad en anglais. Mais faut savoir qu’avant mon blase c’était Don Djado (rires).

Dans le morceau Noctambule présent sur ton premier EP « NOOR » sorti en début d’année, tu cites notamment Mafia K’1 Fry et Ghetto Fab, tu pourrais nous parler de tes inspirations ?

Je suis un grand bousillé de rap français, je l’ai écouté et étudié, que ce soit la FF (Fonky Family), Psy 4 de la Rime, Salif, Lim, Beat 2 Boul, Time B.O.M.B., Despo Rutti, Médine, Kénédy, Tandem, La Comera, Mister You, etc. À Paris j’étais beaucoup de l’école 94 aussi : Dissident, Nessbeal, Zesau … C’est très vaste et je pense que c’est aussi ce qui fait ma force. J’ai également écouté pas mal de rap américain : 50 Cent, Eminem, la West Coast avec Snoop, Dre, Nate Dogg, Warren G, etc. 

Tu es retourné vivre aux Comores quand tu étais plus jeune, comment tu l’as vécu ?

Oui, quand j’avais 7 ans mes parents sont retournés vivre dans leur pays. Je suis revenu quand j’en avait 12, au même endroit à la ZUP de Valence. J’ai pas ressenti de dépaysement dans le sens où j’allais aux Comores chaque années depuis petit. Je me sens aussi bien à la ZUP qu’à Moroni. Et puis à 15 ans, ma famille a estimé que j’étais un peu trop turbulent. Donc ils m’y ont renvoyé jusqu’à mes 17 ans et c’est là-bas en fait que j’ai appris à rapper. C’est pendant ce 2ème « voyage » que je me suis rendu compte de la situation du pays, de la pauvreté, etc. J’ai pris conscience que j’avais de la chance d’être français, d’avoir accès à l’école, ça m’a mis une vraie claque. Tout cela a influencé ma façon de faire de la musique, c’est certain.

Que signifie « NOOR » pour toi et pourquoi le choix de ces covers pour tes 3 premiers projets ?

En arabe littéraire c’est la lumière. Ulhaq (qui est mon deuxième prénom) veut dire vérité et j’estime qu’il faut être vrai pour avoir la lumière. Sur la cover de « Ulhaq » je suis bébé et c’est mon oncle que l’on voit derrière. Sur « NOOR » je suis avec mon cousin (son fils) avec qui je suis super proche depuis petit. Et sur « NOOR 2 », c’est toujours lui et moi et ma mère en plus. En fait c’est les prémices, « Ulhaq », « NOOR » et « NOOR 2 » forment une sorte de trilogie. Ensuite je passerai à un autre cycle, on verra mon visage actuel sur les covers. Et puis c’est également par rapport à tout ce que j’ai écouté chez les cainris tu vois. Tous les plus grands ont une pochette où ils sont bébés : Nas, Lil Wayne, même Alonzo ! Souvent c’est des bêtes de projets (rires) et puis ça me faisait kiffer.

J’ai beaucoup apprécié les sonorités que l’on entend dans le morceau La Lune avec So La Lune justement, vous faites tous les deux parties d’une vague de jeunes pépites très prometteuses pour le rap de demain, comment est-ce que tu vis cette situation ? Y a-t-il une certaine pression ou au contraire pas du tout ?

Nous c’est pas la nouvelle wave, c’est nous les nouveaux mages (rires). Non plus sérieusement j’ai pas de pression particulière. C’est vrai qu’on fait tous les deux partie d’une nouvelle vague. J’ai un peu la tête dans le guidon alors je m’en rend pas forcément toujours compte mais c’est vrai ce que tu dis là. On est pas mal de jeunes avec une forte personnalité. So la lune ne ressemblera pas à Djalito qui ne va pas non plus ressembler à Tedax Max par exemple. Ça me met au contraire une bonne pression en fait. Je leur souhaite à tous de réussir !

On parlait justement de So La Lune et de Djalito qui sont sur le projet. Tu pourrais nous parler des featurings qui sont sur le projet et notamment de la collaboration avec Aketo ?

Pour l’anecdote, la première fois que je rencontre le producteur Madizm (célèbre producteur ayant collaborer notamment avec le label IV My People, Disiz La Peste, Salif, …) je rencontre Aketo au même moment. Je rencontre Madizm par l’intermédiaire de Shone d’Holocost. Il aime ce que je fais donc il m’envoie une prod et me demande de venir la poser au studio. J’y vais et il se trouve que c’était le studio d’Aketo. Je pose le son et en fait il était là. C’est comme ça que la rencontre avec Aketo s’est faite. Plus tard on s’est revu au studio où nous on pose pour enregistrer « Mañana ». Ça s’est fait grave naturellement à 3 heure du matin, ce n’était même pas prévu, c’était du nature peinture.

J’ai eu un réel coup de cœur pour le morceau Dans Le Zoo, peux-tu nous parler de son élaboration ?

C’est une dinguerie parce que Dans le zoo c’est celui avec lequel j’étais le plus réticent tu vois. Mais tout le monde me disait « t’es fou c’est fort faut le mettre dans le projet ». Pour la conception c’est Madizm qui m’a proposé la prod. J’ai kiffé et je l’ai bossé avec un chanteur qui est pote avec lui, il m’a donné quelques conseils et tout. Ce morceau je l’ai écrit en à peu près 1 heure au studio. Le refrain est catchy et c’est un son que je kif même si je l’ai moins saigné que La Lune ou Le temps passe.

Comment est-ce que tu qualifieras ta relation avec Madizm ?

On a emmagasiné certains automatismes et on a une relation assez privilégiée en fait. Il est plus vieux que moi, à la base on se connait depuis peu tu vois, depuis 2020. Ma relation avec lui est naturelle, j’ai beaucoup de respect pour lui. Il a rien à prouver et il s’adapte très bien aux prods de maintenant, y a rien de plus actuel que Dans Le Zoo par exemple. J’apprends beaucoup de lui et il apprend également beaucoup de moi. C’est une relation hyper humaine en fait. Je peux l’appeler à 2 heures du matin et lui dire « wesh l’ancien truc de ouf faut que tu me fasses une prod comme ça… » tu vois. Il dort jamais la nuit ce mec, c’est un bousillé de musique.

On retrouve des thèmes très importants dans cet EP, je pense aux morceaux CFA et Colonisé par exemple, est-ce que selon toi on peut prétendre faire du rap sans prendre position ?

Ah gros, demande à Ekoué non ? (rires) Pour le jeu de mot, je crois que la rumeur elle dit que non hein. Après selon moi, oui et non. Je suis très pragmatique et je suis quelqu’un qui vit avec mon temps. Les mœurs d’aujourd’hui disent que oui on peut prétendre faire du rap sans prendre de position. Mais mes principes et l’essence même du rap qui m’a donné envie d’en faire (qui était un rap très engagé) me dit que non. Colonisé plus que CFA a un vrai message. C’est un de mes sons préférés et qui est tout de même très actuel. D’autant plus avec ce qui se passe en Martinique et en Guadeloupe.

©Derka (@itsderka)

En 2020 tu sors Ulhaq qui est ta première mixtape avant d’enchainer en 2021 avec les EP « NOOR » et « NOOR 2 », comment envisages-tu la suite ? Doit-on s’attendre à un album pour le prochain projet ?

Je sais pas encore quand est-ce que je sortirai un album. Selon moi je dois encore consolider la base de mes auditeurs. Je suis quelqu’un qui, selon moi, doit envoyer plus que les autres pour que ça marche un peu plus. Ça viendra également quand on aura les moyens, on va prendre le temps de le faire … Pour la suite je vais continuer d’envoyer des projets que ce soit mixtape ou EP. Je pense pas que l’album sera pour tout de suite mais on va taffer dessus. Je vois tout ça comme un marathon. Faut que je fasse mes classes et que je continue de bosser, ça prendra le temps que ça prendra mais ça viendra.

Si tu pouvais citer quelques rappeurs comoriens à mettre en avant, tu citerais qui ?

So La Lune déjà, Youmka Lachnikov, 0u2S, Coms, Nota Bene, Gagala, Patsaou, ALP, OMR, SAF, … Je pourrai t’en citer plein ! Les Comoriens et la musique c’est une grande histoire d’amour, il y en a une tonne.

Merci beaucoup pour cette interview. On te souhaite beaucoup de réussite et que de plus en plus de monde découvrent Djado Mado et son univers.

Merci à vous, c’était un super échange ! Là vu que tu posais des questions je savais ce que tu pensais mais j’aimerais bien un jour interviewer un journaliste, ça pourrait être intéressant (rires).

Jules Marfing

For every dark night, there is a brighter day.

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