INTERVIEW JOSUÉ, ENTRE COURONNE ET AURÉOLE
Outsider, voilà comment se définit Josué.
Baigné dans le rap depuis sa tendre enfance, le jeune francilien a délivré en septembre dernier sa mixtape “Béni”, un concentré de bonne parole réparti en 13 morceaux.
Retour sur une discussion riche en couleurs, entre inspirations musicales, religion et volonté d’élévation.
Salut Josué, ton projet « Béni » est sorti en septembre, il s’agit de ton deuxième après « Amen » paru en 2018, quel ressenti as-tu un mois après ?
Je suis content d’avoir fourni des musiques plus longues contrairement à mon premier projet durant lequel j’avais fait 5 morceaux et qui était assez court. Avec ce projet là j’ai l’impression que les gens ont bien apprécié la bonne parole, ils ont bien kiffé.
3 ans sépare les 2 projets, qu’est ce qui a changé pour toi entre temps ?
Il y a eu la tournée d’A2 (A2H). Ça m’a pris un peu de temps mais j’ai découvert la scène du coup j’ai bien kiffé. Entre temps durant cette période le covid a bien bloqué les choses, on devait sortir le projet avant le covid et il avait pas la gueule qu’il a aujourd’hui.
Je pense qu’il n’y a pas de hasard tu vois, là on a été peiné mais juste après est arrivé la signature avec Sony et j’ai pu réaliser des feats. Cette pause de 3 ans comme tu dis je pense qu’elle a été bénéfique pour nous, pour structurer tous les bails afin d’être encore mieux préparé pour la sortie. Cette crise sanitaire au final m’a plus servi que desservi.
Quand as-tu commencé à travailler sur cette mixtape ? Travaillais-tu sur ce projet avant même “Amen” ?
Exactement, il y avait déjà des sons à l’époque d’Amen qui était déjà prêt, je suis quelqu’un qui enregistre énormément. De base je devais sortir une mixtape qui se serait appelée “La poubelle”.
Donc j’avais prévu de mettre beaucoup de sons dedans et y’avait pas forcément de thème. Puis en se concentrant un peu on a trouvé les pépites qui sont sur la mixtape. Des morceaux comme Choppa flow c’est des morceaux que l’on a fait pendant des nuits, on a retapé la prod 3 fois. Le son High 2 par exemple a aussi été fait pendant l’époque d’Amen.
Tu as fais appelle à 10 producteurs différents pour cette mixtape, comment l’alchimie c’est fait entre vous ?
Y’a Benjay qui est un gars à moi, j’ai aussi bossé avec A2 et d’autres beatmakers du Palace (ndlr: Palace Prod, le label de Josué). Je suis pas tant allé loin pour aller les chercher.
“ Je me sens pas comme religieux mais plutôt comme quelqu’un étant dans la recherche d’aller mieux “
On retrouve 9 featurings sur le projet, comment as-tu réalisé le choix des invités ?
Toutes les personnes qui sont sur le projet c’est des personnes qui m’ont donné de la force, c’est des gens qui kiffe mon univers et dont je kiffe le leur. Youri c’est quelqu’un qui a fait un morceau qui s’appelle “tu m’as menti”, à l’époque j’étais en rupture et du coup j’ai saigné ce morceau. Par la force des choses j’ai rencontré Dj Weedim et la connexion avec Youri s’est faite direct.
Cinco c’est un gars que je connais bien depuis longtemps, pour moi c’est normal qu’il soit sur le projet. Neclik c’est quelqu’un que j’ai rencontré sur le planète rap d’A2 et j’ai vu qu’il était chaud. Jaïa Rose je l’ai rencontré sur scène, durant mes premiers concerts et j’ai bien accroché. Roshi j’ai fais beaucoup de scènes avec lui et au bout de la cinquième on s’est dit “viens on fait un truc”. Nekks et Falco c’était des petits reufs qui m’ont donné de la force aussi, enfin ils sont pas petits mais pour l’instant ils n’ont pas le succès qu’il méritent.
Toutes les personnes sur le projet ce sont des personnes de cœur, même sans musique c’est l’humain qui prime. Voilà c’est des apôtres, c’est Josué et ses apôtres (rires).
L’aspect spirituel est omniprésent dans ton projet, comment se caractérise la religion dans ta vie ?
Ma mère m’a appelé Josué, donc déjà il y avait un bail avec la religion mais à 7-8 ans c’est pas trop le genre de chose que je calculais. En grandissant je me suis cherché, j’avais un autre nom de rappeur avant et puis j’ai voulu retourner aux fondamentaux, être moi-même à fond.
Je crois pas à la religion en temps que tel, je me sens pas comme religieux mais plutôt comme quelqu’un étant dans la recherche d’aller mieux. J’utilise des mots bibliques, par exemple mon prochain projet je pourrai l’appeler “la bonne parole” ou “confession” mais c’est plus pour moi une manière de faire passer un message.
Sur la pochette du projet on peut t’apercevoir, le corps émergeant de l’eau, une scène qui fait relativement penser au baptême. Ce sacrement est pour les chrétiens le moment à partir duquel ils sont lavés de leur pêchées ainsi que leur naissance dans une dimension divine. “Béni” ne serait-il pas le symbole d’une renaissance pour toi ?
Ouais pour moi “Béni” c’est une renaissance. Après comme je t’ai dis le premier projet “Amen” on me voit dans le noir, la pochette est dans l’obscurité… Alors que sur “Béni” je sors un peu la tête de l’eau, tu sens que j’émerge, pour moi c’est un renouveau, comme si je revenais 2 fois plus fort.
Comment est ce que tu entretiens la dualité entre l’univers du rap qui peut parfois pousser au vice et à la réussite matérielle face à la religion, représentation de la pureté ?
Je suis cette philosophie. Je suis cette personne qui fait du rap, qui a sa mère qui est mariée avec un pasteur et qui malgré tout est dans ce délire où je fais le bien et le mal en même temps.
J’aime beaucoup ce côté où tu peux faire des choses alors qu’elles sont en réalité interdites, je pense que tout ça c’est des réponses que l’on acquiert durant le questionnement d’une vie.
Ça me fait penser à Népal qui disait “raffiné mai j’obéis aux règles de base”, dans le sens où un équilibre doit être trouvé entre plaisirs matérielles et spiritualité.
Tout excès nuit en réalité, je pense que dans la vie on se cherche, on essaie de trouver les réponses à nos questions, on trouve nos voix par nous même et il peut nous arriver de faire des erreurs, c’est tout.
Malgré tout le thème des relations amoureuses n’est pas en reste sur ce projet, je pense notamment au morceau « cocaïne ». Pour toi l’amour serait elle le résultat d’une addiction, à l’image de la drogue ? Ou bien au contraire, un substitut destiné à pallier un manque ?
Ouais c’est ça le délire, la drogue ça ressemble à l’amour. Je pense que c’est deux choses qui vont ensemble: quand t’es avec elle t’es bien mais dès qu’elle part tu te poses des questions, l’effet que l’amour a sur toi c’est le même que la drogue.
Moi j’ai toujours choisi la drogue à l’amour, parce que je pense qu’elle fait moins mal à la tête (rires) mais tu vois je suis toujours dans cette dualité entre ces 2 choses.
Tu avais dis dernièrement pour “Interlude” que tu avais envie de devenir une source d‘inspiration, quels étaient des idoles étant plus jeune ?
J’étais fasciné par le mouvement rap, pas par une personne en particulier. Y’a Salif que j’ai bien aimé, Sefyu aussi mais sinon j’étais fasciné par tous les rappeurs et j’ai bien aimé tout ce qu’ils m’ont inculqué.
Et aujourd’hui ?
Mon entourage, la vie en général, ça m’inspire fort. J’écoute pas trop de sons, y’a Lefa que j’aime beaucoup, mais je peux pas dire qu’il m’inspire.
Quand je suis en manque d’inspi’ je sors dehors, je vais voir des amis, je me pose, j’écoute les histoires des gens… C’est la vie qui m’inspire, je suis que dans les leçons de vie.
“ J’aimerais bien faire parti d’une vague, et que dans le lot de tout le monde les gens disent: Josué m’a inspiré ”
Pour revenir sur ta phrase pour Interlude, c’est assez intéressant parce que c’est en opposition avec les paroles du morceau « mouvement » (2018) dans lequel tu disais « j’suis pas là pour être ton pote ou ton idole ». D’où t’es venu ce changement ?
En fait au début j’étais en mode outsider, je voulais rien savoir, “je fais du son et je suis plus chaud que vous”. Puis petit à petit quand tu commences à connaître le monde de la musique et tu veux partager avec d’autres personnes, être moins égoïste.
Le changement il est arrivé là, je veux toujours être l’idole de personne, mais si je peux partager ma musique avec d’autres c’est cool.
Merci Josué de m’avoir accordé un moment, voici ma dernière question: où te vois-tu dans 5 ans ?
J’aimerais bien être avec un disque d‘or, mais au-delà de ça j’aimerais que ma musique soit diffusée plus loin, que je puisse faire des trucs acoustiques, que je fasse des lives sur Taratata. Si dans 5 ans je continue à propager ma musique pour moi c’est une réussite.